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Commune de Saulgé

Histoire de Saulgé

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Le bourg de Saulgé s’est installé à proximité de la Gartempe. Sur une terrasse surplombant d’une dizaine de mètres le lit de la rivière, les premières communautés humaines durent trouver là un site regroupant pas mal d’atouts :

  • sur ce territoire comme ailleurs, une vallée importante est un axe de circulation et par conséquent d’implantation des hommes,
  • cette terrasse permettait la proximité avec la rivière tout en étant à l’abri de ses crues,
  • des zones assez planes, liées au grand méandre que fait la Gartempe, avec des terrains assez riches sur le plan agronomique et assez faciles à exploiter (comparés aux plateaux environnants),
  • alentours, des coteaux moyennement escarpés et le vallon du Petit Ris (entrée nord du bourg) durent aussi offrir des zones à exploiter par les communautés majoritairement agricoles qui s’installèrent là…

Pour le reste de la commune, si on regarde une carte, on est frappé par le côté « biscornu » des limites administratives actuelles. Sans doute un héritage des anciennes paroisses et du découpage de la propriété foncière qui les avait déterminées lorsque les communes furent créées à la suite de la Révolution…

Environnement

Alors, les débuts de Saulgé ?

Si des passionnés de préhistoire ont pu trouver des artefacts sur son territoire (pierres taillées de diverses époques, traces de métallurgie), il n’y a pas d’établissement humain temporaire ou plus durable avéré daté de cette très longue période.
Les esprits féconds de quelques générations d’enfants du cru qui ont fréquenté le lieu sauvage de la Grotte de l’Ermitage en haut de la falaise qui domine la Gartempe (nord du bourg, actuel Bois des Roches) y ont imaginé plein de choses, mais rien de tangible pour un archéologue !

L’origine du bourg n’est pas connue mais la découverte de sarcophages mérovingiens (5ème au 8ème siècles), autour de l’actuelle église, prouve que le site était occupé bien avant l’an mil par une communauté humaine à coup sûr établie là, en permanence.
Des archéologues ont émis qu’un vicus, bourgade rurale au temps de la romanité (1er siècle de notre ère) pouvait occuper le site avant même cette période.
Si on observe l’actuelle place de l’église par rapport à ses environs, on voit qu’elle est plus haute de 1 à 2 mètres : l’accumulation de matériaux par l’homme au fil des époques doit dans tous les cas être ancienne par ici !

Les premières certitudes quant à l’occupation permanente du site remontent un peu avant l’an mil : une première église existait, certainement à l’emplacement de l’actuelle, donnée à l’abbaye bénédictine de Bourg-Dieu (à Déols dans l’Indre) en 968 ou en 1090. Nous sommes à l’époque où les ordres religieux se développent et fondent des communautés : à côté de l’église, les bénédictins de Bourg-Dieu créèrent un prieuré, exploitant eux-mêmes quelques arpents de terre autour de l’église ainsi que le moulin de Saulgé, Chez Monjaud ou un peu plus loin à Theuil.
Comme ailleurs, la présence d’une communauté religieuse attira des laïcs, donnant naissance au village, comme en bas de la route de Poilieu, avec des maisons aux bases certainement bien anciennes.

Eglise de Saulgé

Dès le 12ème siècle, la plupart des terres de la commune, en dehors de celles du prieuré bénédictin, appartenaient aux seigneurs locaux : fiefs de Lenest, Beaupuy, Rouflamme, Faydeau, l’Age Rouil (la Jarrouie). Tous ces lieux-dits sont aujourd’hui encore habités. L’ordre religieux des Augustins, de la puissante Maison Dieu de Montmorillon possédait les Bois de l’Hospice, qui couvrent encore plus de 600 ha à l’ouest de la commune. Vers 1250, le passage d’Alphonse, Comte de Poitiers et frère du roi de France Saint Louis, est avéré à Beaupuy, alors nommé Bellum Podium, puisqu’il y coucha.
C’est dans cette période que dans le bourg, l’église fut édifiée suivant des bases proches de sa configuration actuelle, en pleine époque romane.

Durant la guerre de Cent ans

Aux 14ème et 15ème siècles, le territoire fût perturbé, ainsi qu’au 16ème avec les guerres de religion.
Au cours de ces siècles, comment imaginer la vie des habitant.e.s vivant majoritairement de leurs propres élevages et cultures ? L’occupation humaine du territoire communal était très « extensive », en particulier durant les périodes de crises économiques, de guerres ou d’épidémies. Avec une circulation malaisée au milieu des brandes qui couvraient les plateaux du montmorillonnais, l’isolement était fort au cœur de ces maigres hameaux de quelques « feux », avec leurs petits propriétaires fonciers au sein de leurs « courtils » ou « borderies ».

17ème et 18ème siècles : Saulgé est une terre toujours très agricole

Au 17ème siècle, un mouvement voit cette petite propriété foncière être peu à peu rachetée par des puissants locaux. Ce sont des « métairies » qui se forment alors. Ainsi, François Babert rachète ses terres en 1687 à un « journalier » de Theuil, Mathurin Latefa. En 1699, c’est une métairie à Juillé que Babert acquiert.

Au 18ème siècle, le métayage, s’est bien implanté : l’exploitant des terres s’engage à verser au propriétaire la moitié des produits issus de son travail.
C’est la trame du découpage foncier qui structure encore les paysages actuels qui apparaît : là où la petite propriété foncière a perduré, autour des principaux hameaux actuels (La Macherie, Poileu, Beumène…), les parcelles sont petites. Là où les métairies se sont implantées, les parcelles sont plus grandes. Dans les deux cas, sur les limites de parcelles sont souvent implantées des haies qui fournissent fourrage et abri pour le bétail, bois et fruits pour les propriétaires…
La carte de Cassini établie vers 1780 montre que la grande partie des lieux construits ou habités aujourd’hui existaient déjà sur la commune. Elle montre aussi que la brande couvre encore une très grande partie de la commune. En dehors de la vallée de la Gartempe et de ses abords, rares sont les espaces défrichés et exploités par l’agriculture. Autrement dit, les plateaux en brandes sont très peu exploités et l’imaginaire lié au loup en fait des espaces menaçants.

La Révolution de 1789 amène des bouleversements

Ainsi, en 1800 à Lenest, les seigneurs Léonard Chaud de Lenet et son fils Jacques émigrent et leur bien est vendu à Jean Cherpreau. Le château est alors en partie détruit. Quelques années plus tard, la vieille famille revient d’exil et s’arrange avec son acheteur pour reprendre possession de ce qui restait du château, sans doute le donjon qui occupe encore aujourd’hui une cour de ferme…
Cette période voit aussi la vente du prieuré du bourg : la fin d’une longue occupation par le clergé. Le cadastre napoléonien établi vers 1840 montre la place du Prieuré presque fermée par divers bâtiments, une configuration qui va peu à peu disparaître jusqu’à monter son aspect actuel.

Le 19ème siècle voit des transformations lentes mais profondes s’opérer

La société est encore très majoritairement paysanne et à l’économie peu ouverte sur l’extérieur. Les brandes commencent à être massivement défrichées par les grands propriétaires pour être exploitées : les progrès agricoles qui s’imposent peu à peu vont le permettre. Les amendements de sols, avec le marnage et le chaulage, vont être facilités avec l’arrivée du train sur le territoire à partir de la fin des années 1860. Cette amélioration des transports va aussi permettre la diffusion de nouvelles techniques, par exemple en matière de mécanisation des travaux agricoles…

Dans les grandes propriétés foncières, comme au domaine du Léché, la spécialisation agricole s’affirme : le Docteur Autelet, propriétaire, achète de ses moutons à l’inventeur de la race charmoise et en 1873, il en possède 300 têtes. A Beaupuy, le propriétaire M. Penin acquiert également un important troupeau de charmoises. C’est le début de la spécialisation du territoire dans l’élevage de moutons qui s’imposera quelques décennies plus tard. Au Thoureau, c’est la vigne qu’on exploite assez massivement.

Le dernier tiers du 19ème siècle voit l’implantation d’un établissement qui lui aussi produit de l’alcool : la Brasserie de Montmorillon, située le long de la Gartempe sur la commune de Saulgé. Dans les années 1960 s’imposent sur le marché les grandes brasseries du nord-est de la France, de Belgique ou d’Allemagne mais jusque-là, « notre » Brasserie aura été un établissement industriel reconnu et employant nombre d’hommes de Saulgé.

Au niveau des routes, le territoire se structure aussi au 19ème siècle, là où il n’y avait qu’une majorité de chemins souvent impraticables l’hiver. Des voies principales sont implantées suivant leur configuration actuelle comme celle de Montmorillon à Bussière-Poitevine décidée en 1839 (et achevée 20 ans plus tard) ou celle vers Lathus, avec la construction du pont sur la Gartempe en 1879. Des voies secondaires de lieux-dits vers le bourg (Saulgé vers Poilieu décidée en 1879) ou entre lieux-dits (La Macherie vers Le Banchereau et Tralage en 1894) sont aussi construites.

Un progrès social majeur au plan national arrive en 1881 : la loi Ferry instaure l’école primaire publique, laïque, gratuite et obligatoire. Si des enseignements payants existaient déjà depuis une trentaine d’années à Saulgé, l’impact est énorme localement. La commune avait acquis dès 1875, signe des temps, un terrain à l’emplacement actuel de l’école pour la construction d’une mairie avec deux classes au-dessus. En 1898, après divers travaux, l’école publique de Saulgé acquiert sa configuration en bâtiments actuelle.

Brasserie de Montmorillon
Ecole de Saulgé

De la fin du 19ème siècle à aujourd’hui

La fin du 19ème et le début du 20ème siècle sont certainement des périodes assez fastes. Sur le plan de la population, Saulgé connaît un maximum vers 1910 avec 1200 habitant.e.s. Une grande majorité est jeune et travaille dans le domaine agricole. Le bourg de Saulgé compte, outre de nombreux artisans et quelques commerces, une grosse majorité de « journaliers » : des petits (voire très petits) propriétaires fonciers qui exploitent leurs quelques biens de manière assez intensive et qui vendent leur force de travail au jour le jour pour d’autres tâches agricoles. Si les femmes jouent un rôle central tant dans l’éducation des enfants que dans la conduite de certaines travaux agricoles et ménagers, elles n’ont pas à Saulgé comme ailleurs, de statut social propre et ne peuvent être indépendantes.
La 1ère Guerre Mondiale va voir nombre de jeunes saulgéens ne pas revenir du front. Plus tard dans le siècle, le bilan humain de la 2ème Guerre Mondiale et de la guerre d’Algérie sera moins lourd mais celles-ci vont marquer durablement. Si Saulgé a subi de lourdes pertes humaines durant les deux guerres mondiales et la guerre d’Algérie, elle a su être terre d’accueil en 1939 pour la population mosellane, victime de l’exode.

Le 20ème siècle va voir un lot d’évolutions extrêmement rapides même si les biens et les mentalités n’évoluent pas au même rythme : la technologie s’impose dans tous les domaines de la vie personnelle et professionnelle, d’autant plus avec l’avènement de la société de consommation et des « trente glorieuses » à partir des années 1950/1970. La population communale baisse jusqu’aux années 1970/1980, elle vieillit. L’emploi agricole se raréfie, il n’est plus bien considéré socialement et nombre d’actifs se tournent vers d’autres métiers. Certain.e.s vont alimenter l’exode rural vers de grandes villes ; d’autres vont trouver un emploi localement, en particulier dans l’industrie. La population communale va tomber autour de 800 habitant.e.s vers 1970.

Dans ces périodes, un homme a marqué le territoire par « l’aventure » industrielle qu’il a lancée et accompagnée avec quelques autres : Jean Ranger est un saulgéen né en 1930 qui va créer plusieurs usines dans la fabrication de meubles de cuisine ou de salle de bain en bois. Elles emploieront jusqu’à plus d’un millier de salariés ! L’usine de La Trutte, aujourd’hui occupée par la SFEL, est l’une de celles-ci, installée en pleine campagne entre le bourg et Montmorillon.

Le « souffle » industriel va retomber dans les années 1980 sur le territoire. La commune, où l’emploi agricole n’est plus majoritaire depuis déjà plusieurs décennies mais où il fait bon vivre va profiter de sa proximité avec Montmorillon. Plusieurs lotissements sont construits près du bourg (La Grand’Broue, le Pré Clos) et plus récemment dans la continuité urbaine de Montmorillon (La Papéterie, le Patural, Les Hauts de la Papéterie, La Calandre). La population communale va peu à peu s’équilibrer autour des 1000 habitant.e.s…
Une population qui a bien changé en quelques générations mais Saulgé a réussi à maintenir une identité et une envie plutôt partagée de vivre ensemble. Malgré sa taille importante et la dispersion de son habitat, la dynamique associative et la volonté des municipalités volontaires successives n’y sont pas pour rien !